Le gouvernement canadien a mis en place un programme offrant des visas temporaires à un millier de personnes bloquées dans la bande de Gaza, à condition qu’elles soient ensuite soutenues par des proches au Canada. Les coûts liés à de telles démarches peuvent devenir très élevés, poussant de nombreuses familles à recourir à la plateforme de financement participatif GoFundMe.

Les fonds collectés, qui se montent à des dizaines de milliers de dollars, visent à couvrir les frais de permis d’entrée en Égypte via le poste frontière de Rafah, le transport vers Le Caire, l’hébergement, la nourriture pendant l’attente du visa, ainsi que les billets d’avion pour la destination finale. Une partie des fonds est également destinée à soutenir les familles à leur arrivée. Les montants varient selon le nombre de membres de la famille à évacuer de Gaza.

Actuellement, il existe de nombreuses initiatives de ce type sur GoFundMe : une simple recherche avec le terme « Canada » montre que 44 des 96 premiers résultats concernent des demandes d’aide pour évacuer des familles de Gaza.

En élargissant la recherche à d’autres pays, tels que les États-Unis, le Royaume-Uni, l’Australie ou la Nouvelle-Zélande, et en ajoutant les noms de conflits récents en Ukraine, en Afghanistan ou au Soudan, on trouve de nombreux appels à l’aide, chaque histoire étant plus émouvante que la précédente.

Prenons l’exemple de Yusuf, résidant au Canada, qui cherche à collecter environ 227 000 $ pour faire venir huit membres de sa famille depuis Gaza, après avoir perdu plus de 80 proches depuis le début du conflit.

« Ma mère est gravement asthmatique et mon père diabétique ; nous peinons à trouver des médicaments pour eux », confie-t-il. « L’absence d’accès à l’eau potable et à la nourriture a provoqué de nombreuses maladies. »

Capture d'écran prise sur le GoFunfMe
Capture d’écran prise sur la plateforme GoFundMe

« Mes proches sont éduqués et viennent de divers horizons professionnels », poursuit-il. « Ma mère est orthophoniste, mon père est retraité, mes frères sont comptables et mes belles-sœurs travaillent dans le secteur bancaire. Ils ont tout perdu, y compris leurs moyens de subsistance. »

Moosa cherche également à assurer le passage de sa famille après que ses parents et ses trois frères et sœurs aient dû quitter leur domicile, peinant à trouver les nécessités de base. Il espère récolter environ 70 000 $.

« Mes parents ont été contraints de se réfugier plus au sud, mais manquent de provisions », explique-t-il. « Leur accès à la nourriture est limité, et ils disposent à peine d’eau potable. »

« Après avoir épuisé toutes les options, je sollicite maintenant votre soutien pour aider ma famille à traverser cette période difficile. La sécurité de mes proches me préoccupe profondément. »

Samir souhaite également amener sa sœur, son beau-frère et leurs deux enfants au Canada. Avec des ressources limitées, il doit prioriser l’aide à certains membres de sa famille à Gaza et espère récolter 45 000 $ pour leur apporter son soutien.

« Face aux coûts élevés du voyage, j’ai été forcé de faire un choix difficile, en espérant pouvoir aider d’autres membres de ma famille ultérieurement », déclare-t-il.

Tous n’atteignent pas leurs objectifs ; Yusuf et Moosa ont atteint 66 % de leur cible, tandis que Samir en est à mi-chemin.

Abu, qui tente de collecter 200 000 $ pour faire venir sa famille au Canada, n’a réussi à rassembler qu’une fraction de cette somme.

« J’ai perdu ma maison, qui abritait plus de 25 membres de ma famille et était remplie de souvenirs et de photos précieuses », partage-t-il. Sa famille vit désormais à Rafah, dans le sud, dans des conditions précaires, sans accès à l’eau potable, aux soins médicaux ou à des installations sanitaires adéquates.

Photo: UNRWA
Photo: UNRWA

Ayman et Huda, ayant besoin respectivement de 100 000 $ et de 50 000 $, n’ont réuni que moins de 10 % des fonds nécessaires.

Plusieurs organisations venant en aide aux réfugiés palestiniens conseillent la prudence face à de telles initiatives. Thomas Woodley, président de la Fondation Canadiens pour la Justice et la Paix au Moyen-Orient (CJPMO), recommande de privilégier les dons aux organisations humanitaires reconnues pour éviter les abus.

En juillet 2022, une femme du New Jersey a été condamnée après avoir collecté 400 000 dollars pour venir en aide à un sans-abri. La majeure partie de la somme a été dépensée dans une BMW, des jeux d’argent, des sacs à main Louis Vuitton, un voyage à Las Vegas et un tour en hélicoptère au-dessus du Grand Canyon.

« Pour prévenir la fraude, nous recommandons la prudence, comme dans toute autre situation à risque », souligne-t-il. « Il est préférable de soutenir des organisations réputées, capables d’une gestion transparente et efficace des fonds dans les zones de conflit. »

« Si l’on envisage de contribuer individuellement via GoFundMe, il est crucial de vérifier l’authenticité du cas. En l’absence de confirmation indépendante, il est sage de s’abstenir. Même en cas de vérification, les organisations humanitaires professionnelles restent les mieux équipées pour évaluer les besoins et distribuer l’aide de manière équitable », conclut-il.

Malgré les défis et incertitudes liés à la collecte de fonds sur des plateformes telles que GoFundMe, cela demeure l’unique option pour de nombreuses personnes bloquées à Gaza, ainsi que pour leurs familles, espérant retrouver leurs proches sains et saufs.

*Les noms mentionnés dans cet article ont été modifiés pour préserver l’anonymat.

Gautam est un journaliste, rédacteur en chef et rédacteur web expérimenté, rompu aux médias numériques et imprimés. Fort de plus de dix ans d'expérience éditoriale dans cinq pays, dont le Canada...