Junior Nsamia Mayema près de chez lui à Montréal. Photo: Jean-Numa Goudou

Texte écrit en collaboration avec Pierre Michaud.

Aussi longtemps qu’il se souvienne, Junior Nsamia Mayema, a toujours été attiré par des hommes. Mais les péripéties qu’il a endurées au sein de sa propre famille congolaise (RDC), de la société et dans le monde, l’ont amené, en fin de compte, à douter de son orientation sexuelle.

M. Meyama commençait vraiment à craindre pour sa vie dans son pays d’origine lorsque sa propre famille menaçait de le tuer, en 2010. Ils le considéraient comme «la honte» et postulaient qu’il amenait «le déshonneur» dans leur rang.

« Certains de mes frères et récemment ma sœur me disaient, à travers un message texte même, que j’allais mourir », affirme le demandeur d’asile. « On se parle rarement, eux et moi. »

Au bout d’un moment, il a craqué et a songé à changer d’orientation sexuelle malgré lui. « À un moment donné, je n’en pouvais plus de la souffrance d’être gai. Je suis allé dans une église pour qu’on m’aide, pour qu’on me délivre de ce mauvais esprit que tout le monde disait que j’avais », confie le ressortissant de la RDC.

Il commence alors à changer ses habitudes vestimentaires, à ne plus fréquenter la communauté gai. Cela a duré près de deux ans. Mais, « ça n’a rien changé, malgré qu’on priait. Lorsqu’ils se sont rendu compte de cela, ils ont commencé à me rejeter », raconte celui qui « pensait qu’il y avait un miracle possible » dans son cas.

Un périple

Pour sauver sa peau, Junior Nsamia Mayema quitte son pays en 2010 pour se réfugier en Afrique du Sud, grâce au soutien du Haut-Commissariat des Nations unies pour les réfugiés (HCR). Depuis, il bénéficie d’un numéro de protection internationale.

Junior Nsamia Mayema près de chez lui à Montréal. Photo: Jean-Numa Goudou

Mais voilà, il est encore persécuté dans ce pays d’Afrique où l’homophobie est très présente, et parfois même la xénophobie. Après quatre ans, le HCR l’aide à aller aux États-Unis, bien qu’il aurait préféré aller au Canada.

Le protégé de l’ONU est resté en Californie pendant au moins neuf ans. Il a même acquis la nationalité américaine. Mais, « les États-Unis n’ont pas réussi à me fournir la protection nécessaire et ont permis à des personnes qui avaient tenté de me tuer en Afrique du Sud de tenter de m’assassiner », affirme-t-il aujourd’hui pour expliquer pourquoi, en avril dernier, il a pris un avion pour Montréal afin d’y demander la protection d’un autre pays : le Canada.

Les USA, dangereux?

« Pendant tout le temps que j’étais aux USA, j’ai connu la misère, la discrimination, la xénophobie et l’homophobie, au point de vouloir mourir », témoigne Junior Nsamia Mayema en entrevue avec MNC.

Il raconte que dans l’immeuble où il avait son logement en Californie, un de ses voisins, blanc, lui faisait subir toutes sortes de sévices. L’homme frappait violemment à sa porte régulièrement pour lui hurler des insultes en raison de son orientation sexuelle, laissait des déchets devant son appartement et l’agressait verbalement sans que la police puisse intervenir. Il est même allé devant les tribunaux pour obtenir une mesure d’éloignement contre cette personne, mais sans résultat.

« En Afrique du Sud, la police m’a dit : ‘Pourquoi es-tu homosexuel ? Tu ne sais pas que c’est mal ? Et nous, il n’y a rien qu’on puisse faire pour toi.’ Et aux États-Unis, la police ne fait rien non plus », dénonce-t-il.

« Les États-Unis étaient trop dangereux pour moi », déclare le ressortissant congolais, diplômé en droit aux USA en tant que parajuriste. Junior Nsamia Mayema croit qu’à Montréal, il retrouvera la paix. Dans le quartier de LaSalle où il vit, il aime aller méditer au bord du fleuve.

L’indifférence d’un frère

S’il est rejeté par la majorité des membres de sa famille immédiate, ce n’est pas le cas pour un d’entre eux. Son jeunes frères, Soumi Mayema, qui vient d’arriver au Québec avec un visa d’étudiant en informatique, garde un contact étroit avec lui.

Junior Nsamia Mayema près de chez lui à Montréal. Photo: Jean-Numa Goudou

Il confirme les persécutions que son grand frère a subies dans son pays, la RDC. Même si Soumi Mayema, 24 ans, que MNC a rencontré, ne soutient pas l’orientation sexuelle de son grand frère, il dit toutefois respecter le choix de son frère.

« Ça dépend d’une personne à l’autre. Mais moi, je ne porte pas de jugement. Toutefois, chez nous, cela n’est pas accepté. Moi, je pense que c’est son choix et Dieu y pourvoira », espère Soumi Mayema.

Une intégration difficile

Junior N. Mayema a pris contact, depuis son arrivée, avec la communauté LGBTQ+ pour l’aider à trouver les ressources nécessaires à une bonne intégration. Cependant, sans vouloir élaborer davantage, cela ne se passe pas comme il l’aurait souhaité avec l’organisme Action LGBTQ+ avec les immigrant·e·s et réfugié·e·s (AGIR). Il a aussi tenté de s’engager auprès de l’Église unie du Canada, sans grand résultat.

Le réfugié de l’ONU a finalement trouvé un peu de paix au sein de l’Église des saints des derniers jours : les Mormons, qui l’aident à subvenir à ses besoins. Car, malgré l’obtention d’un permis de travail, il n’a toujours pas trouvé d’emploi.

Après plusieurs mois passés à Montréal, M. Mayema commence à être désenchanté par la lenteur de son intégration en tant que minorité sexuelle ayant une histoire d’immigration particulière. Il envisage parfois de déménager vers Ottawa.

Jean Numa Goudou, Canadien d'origine haïtienne, possède plus de 25 ans d'expérience en journalisme. Ayant commencé sa carrière à Radio-Métropole à Port-au-Prince, il a ensuite immigré au Canada,...